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Billet d’humour, où l’on essaiera autant la fantaisie que le mécontentement.

Le 20 février dernier, José Bové s’exprimait au micro de France-Inter, à propos des élections européennes. Répondant à la question de Patrick Cohen lui demandant s’il ne craignait pas une poussée du Front National, il répondait que le FN et ses députés n’en avaient que faire des travaux de la commission et qu’ils venaient siéger et pointer, uniquement pour toucher leur chèque tout comme les intermittents du spectacle !

Ce à quoi je répondais illico presto par une missive ainsi rédigée :

 

Monsieur,

Vous êtes prié de faire immédiatement des excuses aux milliers d’artistes et de techniciens du spectacle que vous avez allègrement comparé ce matin sur France-Inter aux Le Pen et autres Golnisch en les accusant de toucher beaucoup d’argent, sans doute faisiez-vous allusion aux allocations chômage…

Je suis moi-même comédien, maintenant à la retraite. Je peux vous dire que nous sommes énormément de professionnels dans mon cas: je compte les mois dans ma carrière où j’ai pu dépasser 2,000 € de salaire et d’allocations, et ma retraite est de 1090€.

Quand on ne connait pas certains sujets on se la boucle.

En attendant ne vous la bouclez pas pour présenter des excuses.

Avec tout mon mépris.

 

Ce à quoi il me répondait non moins illico presto par le mail suivant :

Aux intermittents du spectacle

Chers amis,

Invité de la Matinale de France Inter ce matin à 08h20, j’ai eu une expression absolument inappropriée en déclarant que du fait de leur absentéisme, les députés du Front National au Parlement Européen étaient des intermittents du spectacle. C’est justement parce que vous vous battez depuis des années pour votre statutque l’expression « intermittent du spectacle » est rentrée dans le langage courant.

J’ai toujours soutenu les combats des intermittents et précaires du spectacle pour leur droits. Sans le soutien de l’ensemble des intermittents du spectacle en grève pendant l’été 2003, jamais le grand rassemblement du Larzac n’aurait pu avoir lieu. Et je leur reste particulièrement reconnaissant. A plusieurs reprises, j’ai manifesté ma solidarité, notamment en 2004 à Cannes, où j’ai servi d’intermédiaire pour permettre à Mickaël Moore de manifester sur la croisette.

Aujourd’hui, vous êtes en lutte contre la modification de l’assurance chômage et pour de nouveaux droits. A vos côtés, je dénonce la provocation de M. Gattaz, le président du MEDEF et je soutiens naturellement vos revendications pour un système de rémunération et de chômage juste et équitable pour tous.

A vos côtés de façon indéfectible,

Amitiés

José Bové.

 

Estimant qu’il répliquait un peu à côté de la plaque, ce courriel lui fut alors adressé derechef :

Monsieur,

Il est bien gentil de nous rappeler vos différentes prises de position et faits d’armes concernant l’intermittence du spectacle. Mais malheureusement pour votre attaché-e parlementaire qui a rédigé votre réponse, la question n’est pas là.

1) Nous vous   demandions des excuses; elles n’y sont point. Vous faites référence au "langage courant”; personne n’est obligé de l’employer… même José Bové.

2) Vous comparez l’absentéisme des Le Pen et consorts avec nos professions. Mais, Monsieur, vous vous enfoncez: nous sommes des "privés d’emploi"! Lorsque nous bossons, nous sommes des salariés avec fiche de paie, cachets, heures de répétition, etc. Nous ne sommes pas absents. Lorsque le métier s’éloigne, nous ”bénéficions” d’allocations chômage par solidarité interprofessionnelle.

3) Le terme de ”bénéfice” me permet d’enchainer sur une autre grosse faute de votre part que vous n’avez pas (encore?) réparée  dans l’émission de Patrick Cohen, vous nous accusez ainsi que les représentants de l’extrême droite de ”venir toucher leur chèque”, sous entendant que nous gagnons vraiment bien notre vie. Relisez bien mon premier courrier...

4) Sachez, pour votre gouverne et celle de vos rédacteurs, que l’intermittence n’est pas un ”statut”. Nous avons le statut de salarié. L’intermittence est liée à un régime d’assurance chômage.

5) En espérant que vous rectifierez tous ces propos, je ne vous adresse pas  toutes mes amitiés. Vous commencez votre courriel par ”chers amis”, ce terme facebookien n’est à utiliser qu’avec parcimonie, comme celui d’ailleurs… d’intermittent.

 

J’attends toujours la réponse. Dans l’ambiance patronale de remise en cause des droits sociaux de l’ensemble des chômeurs, ceux qui touchent leur chèque à ne rien foutre s’estiment un peu montrés du doigt. C’est pourquoi je pense que l’on ne peut en rester là.

Je ne vais pas expédier un recommandé avec accusé de réception au député bio. Aussi imaginé-je, par le truchement de cette chronique, une suite au feuilleton :

4ème épisode : réponse rêvée au silence du député vert.

Monsieur,

L’orgueil est soi-disant essentiel en politique. Mais quoi de plus noble et de plus généreux que de reconnaître ses erreurs et en particulier ses abus de langage. Il est vrai que nous vivons une époque où le lieu commun et le cliché pullulent (sans doute pour « faire peuple » ?). Cependant, un homme politique se doit de faire attention au sens des mots et  de corriger le tir s’il a dérogé au bon…sens.

Re-Monsieur, faites-le, excusez-vous, élevez-vous de quelques centimètres au dessus du plancher des chèvres. Vous qui défendez le veau et l’orpheline, n’hésitez pas. Je suis plutôt un terrien comme vous, mais un certain esprit marin me fait m’accrocher à mes convictions tel la moule à son rocher : je ne vous lâcherais pas.

Faites un effort, Monsieur. Je ne sais si vous vous représenterez  devant les électeurs; mais si vous y songez, sachez, pour continuer  la métaphore agricole et bucolique, que le coq n’a pas de honte à savoir se faire agneau, et le paon chaton ; abandonnez ces préjugés insolents qui nous comparent à des oies qui se goinfreraient.  Pour que  les guitaristes, les chanteuses, les preneurs de son, les habilleuses, les comédiens et autres régisseurs n’aient pas trop de rancœur ni d’amertume envers vos propos, osez l’excuse et nous ne vous appellerons plus « Monsieur » mais continuerons tout simplement à vous nommer… José.

Encore Monsieur, l’Agriculture et la Culture ont apparemment sept lettres en commun. Elles ont plus que cela, car elles sont profondément liées à l’humain. Ne gâchez pas le moment où, avec plaisir, nous pourrons déguster ensemble un bon verre de vin en écoutant un texte émouvant qui nous transportera tout autant.

Je vous attends

Je ne sais si ce texte atteindra le José en question d’une manière ou d’une autre, mais je sais que j’ai fait mon travail de syndicaliste, d’artiste et de chasseur de lieux communs.

Henry U.

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